Le système éducatif français se caractérise par une valorisation des savoirs académiques (Troger, Bernard & Masy, 2016) acquis durant des études longues et des parcours linéaires. Cette survalorisation des savoirs académiques place la formation professionnelle en second plan par rapport à la formation générale (Verdier, 2008 ; Imdorf, Granato, Moreau, & Waardenburg, 2010). Une part non négligeable des élèves choisissent la voie professionnelle par dépit et se retrouvent dans une orientation subie plutôt que choisie (Verdier, 2001). Ce sont également les élèves ayant le niveau scolaire le plus faible qui sont davantage orientés dans cette voie. Les élèves s'en retrouvent démotivés (Arrighi & Gasquet, 2010) et le pourcentage d'élèves en décrochage scolaire atteint les 20% en lycée professionnel. A cela s'ajoute la présence d'élèves scolarisés en ULIS, inclus dans les classes de CAP pour faciliter leur insertion professionnelle (Lansade, 2021). Cela rend particulièrement difficile le métier d'enseignant qui doit faire face à des classes fortement hétérogènes, avec des élèves ayant un niveau faible et très peu de motivation pour le cursus suivi, ainsi que des élèves en situation de handicap. Or, peu de recherches s'intéressent à cette institution et aux difficultés rencontrées par les acteurs qui l'habitent.
Le travail présenté dans cette communication s'inscrit dans une recherche collaborative impliquant une équipe de recherche et un collectif d'enseignants d'Anglais réunis par les inspecteurs dans un dispositif innovant de cet enseignement en CAP, intitulé CAPture (Olympio et al., 2021). Le collectif s'est inscrit dans la démarche des lieux d'éducation associés (Léa) dans une double visée de développement professionnel d'une part, et de production de savoirs scientifiques d'autre part (Morrissette et al., 2017). L'objectif est d'articuler une production de savoirs et de ressources au bénéfice de la communauté éducative et de la communauté scientifique. Dans ce cadre, des binômes enseignant/chercheur se sont constitués pour travailler sur des pôles de développement professionnel. Nous relaterons les résultats émanant d'un de ces binômes, portant sur la gestion de l'hétérogénéité des élèves.
Les données récoltées sont issues des verbatims de deux autoconfrontations, réalisées à partir de deux séances filmées de la même enseignante avec la même classe d'élèves de CAP. La première s'est déroulée début 2022 (les élèves étaient en seconde CAP) et la seconde début 2023 (les élèves étaient en Terminale CAP).
Le travail d'analyse porte dans un premier temps sur les éléments jugés comme significatifs par l'enseignante, et le discours réflexif autour des extraits choisis, lors des deux autoconfrontations. Puis, un travail autour de l'évolution professionnelle de l'enseignante est présenté à partir de l'analyse faite de l'enseignante elle-même et de la chercheuse associée. Ces résultats illustrent les apports et les limites de l'utilisation de l'autoconfrontation comme outil de développement professionnel dans le cadre d'une recherche collaborative.
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