Nous disposons, pour le français, de peu de résultats de recherches qui seraient centrées d'une part sur les élèves et sur ce qu'ils font de leurs connaissances grammaticales quand ils écrivent ; d'autre part sur les enseignants et l'impact de leurs connaissances sur leurs choix didactiques. Or, comme souligné pour l'anglais par Myhill (2016), le travail métalinguistique et l'utilisation d'un métalangage adapté, facteurs de progrès, apparaissent comme très dépendants des pratiques et choix didactiques de l'enseignant.
Une recherche collaborative (Bednardz, 2013) sur l'enseignement de l'orthographe et de la grammaire s'est mise en place dans une circonscription de Haute-Savoie dans le cadre d'un pôle Education consacré aux apprentissages fondamentaux, financé par le 3e programme d'investissement d'avenir: une équipe réunissant des professeurs des écoles et des professeurs de collège et de lycée, d'une conseillère pédagogique et d'une chercheuse didacticienne, travaillent depuis deux ans de façon collaborative avec l'objectif commun d'amener les élèves à une démarche réflexive sur la langue et de les aider à la transférer en production d'écrit.
Le groupe collaboratif expérimente une démarche reposant sur l'utilisation de corpus d'apprentissage consistant à « sélectionner les textes et les énoncés les plus appropriés à la démarche que l'enseignant veut construire [...] en fonction d'une vision claire de la notion qui fait l'objet de la démarche d'apprentissage » (Grossmann et Parisi, 2009 : 176). Cette démarche, préconisée dans les programmes de l'école et du collège en France, n'est pas nouvelle ; son intérêt est d'aider les élèves à la conceptualisation grammaticale (Ulma, 2016) ; elle figure en bonne place dans un ouvrage récent consacré à l'enseignement de la grammaire (Garcia-Debanc, Roubaud & Béchour, 2022). Le travail à partir de corpus est complété par de très courtes dictées ciblées sur les apprentissages réalisés, qui sont des occasions de verbalisation des connaissances par les élèves (Fisher et Nadeau, 2014).
Le groupe d'enseignants s'est fixé comme objectif de mettre au point et tester en classe, du CM1 à la classe de 6e une séquence construite à partir de corpus, de formaliser la démarche et de travailler à l'élaboration d'une progression de façon à ce que chaque enseignant du groupe puisse expérimenter la démarche corpus sur un ensemble de séances dans une ou deux classes en intégrant des productions d'écrits courts ; de participer à l'élaboration et/ou la validation des tests pour évaluer les progrès des élèves. Le dispositif a été expérimenté dans quatre classes de cycle 3 (2 de CM1-CM2 et deux de 6e) au printemps 2023. 4 autres classes ont servi de classes témoin.
La communication sera l'occasion de présenter les premiers résultats de cette expérimentation, notamment en termes de progrès des élèves, mais aussi appropriation du dispositif par les enseignants. Les conclusions porteront sur le croisement des expertises, la façon dont le questionnement est diversement posé par les uns et par les autres, le sens trouvé dans cette recherche collaborative par chacun des membres du groupe.
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