La formation en ostéopathie est reconnue officiellement en France depuis la publication en 2014 d'un référentiel de formation. Cependant, ce nouveau référentiel ne donne aucun véritable cadre au rôle des formateurs. Ainsi, pour être formateur dans une école, sont requises cinq années d'ancienneté professionnelle sans aucun prérequis en pédagogie ou en sciences de l'éducation. Nous savons pourtant que plus un professionnel est expérimenté, plus il est susceptible d'éprouver des difficultés à transmettre ses savoirs car ceux-ci sont incorporés (Lamy, 2008). C'est ainsi qu'en tant que chercheurs nous nous sommes interrogés sur la manière dont se forment les formateurs devant apprendre à transmettre.
Pour répondre à cette question, nous avons sollicité un cadre conceptuel situé dans le champ de l'analyse de l'activité, ayant des points de similitudes avec une recherche-action (Berger, 2003). Notre cadre est issu principalement de l'ergonomie (Leplat, 2008), il mobilise également plusieurs courants, dont la didactique professionnelle (Pastré, 2008) et le cours d'action, tout en y associant leurs méthodologies. C'est ainsi que nous avons pu filmer 14 formateurs en situation d'enseignement, séances suivies d'entretiens collectifs et d'auto-confrontation (Theureau, 2010). Notre travail avait pour ambition de mieux comprendre l'activité d'un formateur en situation mais également les savoirs d'action déjà construits mais aussi essaient de construire collectivement leur identité professionnelle.
Cette recherche a permis d'identifier plusieurs savoirs d'action (Barbier, 1996) d'un formateur et les compétences parfois manquantes qu'ils souhaitent développer. De plus, elle a mis en évidence un décalage entre l'enseignement proposé et la pratique réelle en cabinet des formateurs, remettant en cause le corpus à enseigner. Comment repenser les contenus à enseigner mais aussi les situations didactiques à imaginer pour faciliter l'apprentissage des étudiants ? Comment changer de posture entre leur expérience de praticien et leur fonction de formateur ? Les résultats de cette recherche ont permis la création d'un diplôme d'université spécifique aux formateurs ostéopathes qui se donne pour objectif de former à ces compétences professionnelles spécifiques, tout en former les formateurs à l'analyse de leurs pratiques par le développement de leur réflexivité. En conclusion nous montrerons comment une initiative de recherche a pu contribuer à un processus de professionnalisation d'un métier en partant de l'activité réelle mise en lumière par la recherche.
Barbier, J.-M. (1996). Savoirs théoriques et savoirs d'action (Vol. 1‑1). Presses universitaires de France.
Berger, G. (2003). La recherche-action : épistémologie historique. Dans P. M. Mesnier, & P. Missotte (Éds), La recherche-action : une autre manière de chercher, se former, transformer (pp. 13-26). Paris : L'Harmattan.
Lamy, J. (2008). Les savoirs incorporés : la mise en scène du corps chez les astronomes toulousains du xviiie siècle. Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, 115-1, 119-131. https://doi.org/10.4000/abpo.358
Leplat, J. (2008). Repères pour l'analyse de l'activité en ergonomie. Presses Universitaires de France. https://doi.org/10.3917/puf.lepla.2008.01
Pastré, P. (2008). La Didactique professionnelle : origines, fondements, perspectives. Travail et Apprentissages, 1, 9-21. https://doi.org/10.3917/ta.001.0009
Theureau, J. (2010). Les entretiens d'autoconfrontation et de remise en situation par les traces matérielles et le programme de recherche « cours d'action ». Revue d'anthropologie des connaissances, 4,2, 287-322. https://doi.org/10.3917/rac.010.0287